Loyers commerciaux et période d’urgence sanitaire : la Cour de cassation prend enfin position

On se souvient que lors de la période d’urgence sanitaire en 2020, des preneurs à bail avaient cessé de payer leurs loyers, à la suite des mesures de fermeture par les autorités de certains établissements recevant du public.

Pour en justifier, certains avaient invoqué la force majeure ou la théorie de l’imprévision, d’autres avaient soulevé l’exception d’inexécution ou encore excipé de la perte de la chose louée sur le fondement de l’article 1722 du code civil.

On attendait depuis que la Cour de cassation se prononce sur le point de savoir si ces justifications pouvaient valablement être soulevées. C’est désormais chose faite depuis trois arrêts rendus le 30 juin dernier (Cass. civ. 3, 30 juin 2022, n° 21-20.190, n° 21-19889 et n° 21-20.127).

La Cour a pris clairement position, estimant que les loyers restaient dus.

La force majeure ne peut être invoquée que par un débiteur qui ne peut exécuter son obligation, et non par un créancier – ici le preneur à bail – qui ne peut bénéficier de la jouissance paisible du bien.

L’exception d’inexécution ne fonctionne pas non plus : l’impossibilité d’exploiter les biens immobiliers pour les différents preneurs à bail était imputable au législateur et non aux bailleurs.

En outre, pas de possibilité d’invoquer la perte de la chose louée. La Cour juge que l’effet de l’interdiction de recevoir du public, « mesure générale et temporaire, sans lien direct avec la destination contractuelle du local loué, ne peut être assimilée à la perte de la chose, au sens de l’article 1722 du code civil« .

En résumé, les mesures prises dans le cadre de la crise sanitaire n’étaient pas imputables aux bailleurs, de telle sorte que l’arsenal juridique déployé par les locataires pour justifier du non-paiement de leurs loyers ne pouvait valablement prospérer.

Les propriétaires bailleurs sont en droit de réclamer le paiement de l’intégralité de leurs loyers pendant la crise sanitaire (COVID-19) et il ne peut qu’être conseillé aux locataires de négocier des délais de paiement et reports, toute autre possibilité leur étant fermée par ces jurisprudences récentes.