Savez-vous combien coûte la « compliance fiscale » ?

Le Parlement européen a publié en février 2023 une étude sur les coûts de mise en conformité fiscale auxquels font face les entreprises au sein de l’Union européenne, notamment les PME. En voici les principaux enseignements.

La définition des coûts de mise en conformité fiscale

Les coûts de conformité fiscale ne désignent pas le montant d’impôts que les contribuables doivent payer mais renvoient plutôt aux actions que les contribuables doivent entreprendre pour payer leurs impôts. Le paiement des impôts implique une planification financière et comptable, l’enregistrement des transactions, la collecte et le stockage de documents, le dépôt de déclarations et éventuellement la gestion des contrôles et contentieux. Toutes ces activités entrent dans la définition de la conformité fiscale.

Si l’on élargit le champ de la définition, les administrations publiques sont également confrontées à des coûts de conformité dans la mesure où elles doivent recevoir, traiter et vérifier les déclarations fiscales, contrôler les contribuables pour réduire la non-conformité et participer à des contentieux. Globalement, les coûts de mise en conformité, tant privés que publics, absorbent des ressources qui s’ajoutent aux montants transférés des contribuables aux trésors publics au titre des recettes fiscales.

Les principaux enseignements de l’étude

  1. Les coûts de conformité fiscale supportés par les personnes privées sont significativement plus élevés que ceux supportés par les administrations publiques (de l’ordre de deux à six fois plus, en moyenne). Les coûts supportés par les entreprises représentent en moyenne à 1 à 2 % de leur chiffre d’affaires et 15 000 € par an.*
  2. Les coûts de conformité agissent comme une surcharge sur les coûts de main d’oeuvre et peuvent être perçus comme ne présentant aucun avantage social ou économique. Une réduction de ces coûts de conformité pourrait influencer l’économie en augmentant la productivité moyenne de la main d’oeuvre tout en réduisant les coûts salariaux et les coûts de production.
  3. La différence de secteur d’activité de l’entreprise a peu d’influence sur les coûts de conformité fiscale. En revanche, la taille de l’entreprise a une influence importante : les coûts augmentent avec la taille de l’entreprise, mais moins que proportionnellement. Cela a pour conséquence que les entreprises plus grandes supportent en moyenne des coûts proportionnellement moindres. Les PME supportent donc une charge proportionnellement plus élevée.
  4. Selon un sondage, la France fait partie des États dans lesquels l’évolution rapide de la législation et des politiques ainsi que la complexité des procédures administratives sont considérées comme des problèmes (seules la Roumanie, l’Italie et la Grèce obtiennent de moins bons résultats, ces aspects étant perçus comme moins problématiques dans tous les autres États). Cette étude souligne que l’instabilité des mesures et leur complexité sont corrélées dans une large mesure. Cette observation suggère que les décideurs politiques devraient avoir une approche différente dans laquelle des réformes moins nombreuses et plus larges seraient introduites.
  5. La France fait partie des États qui accordent le plus d’incitations fiscales pour les petites et les micro-entreprises (avec l’Espagne, la Hongrie, la Lituanie ou encore la Belgique).
  6. Les entreprises qui ont une activité internationale ne supportent pas un coût significativement plus élevé. A priori, elles peuvent être confrontées à des exigences de conformité différentes (par exemple en matière de TVA) et avoir à traiter avec plusieurs systèmes fiscaux distincts, chacun ayant ses propres règles. On pourrait donc s’attendre à ce que ces entreprises soient confrontées en moyenne à des coûts de conformité plus élevés. Toutefois, les données disponibles suggèrent, de manière plutôt contre-intuitive, que le fait d’être confronté à une multiplicité de systèmes fiscaux n’affecte pas de manière significative les coûts totaux de conformité fiscale. L’étude suggère que l’impossibilité d’exploiter les prix de transfert pour les entreprises qui ont une activité purement interne pourrait être un élément d’explication.

Les projets d’harmonisation européenne pour réduire ces coûts de conformité fiscale

D’une manière générale, la complexité, l’instabilité et la diversité des règles fiscales augmentent les coûts de mise en conformité fiscale. Des projets d’harmonisation européenne sont en cours d’élaboration afin de diminuer ces coûts de mise en conformité fiscale, notamment le projet BEFIT (Business in Europe : Framework for Income Taxation).

Ce projet vise à définir une base d’imposition commune afin de réduire la complexité et les coûts associés auxquels font face les entreprises, afin de créer une approche cohérente de la fiscalité des entreprises au sein de l’Union européenne, grâce à des règles plus simples et plus claires. Ce projet a récemment fait l’objet d’une consultation publique, qui a été clôturée le 26 janvier 2023, et devrait aboutir sur une proposition de directive.