Projet de loi de finances pour 2022 : les principales mesures fiscales

Le projet de loi de finances pour 2022 (PLF 2022) a été présenté le 22 septembre en Conseil des ministres. Le texte a commencé à être examiné par l’Assemblée nationale le 11 octobre.

Ce PLF est marqué par la stabilité et par la poursuite des mesures de baisse des impôts pour les entreprises et les ménages. Le taux de prélèvements obligatoires devrait continuer à décroître, passant de 44,5 % du PIB en 2020, 43,7% en 2021 puis 43,5% en 2022.

Voici un aperçu des principales mesures fiscales proposées, actuellement examinées à l’Assemblée nationale. De nombreuses évolutions peuvent encore intervenir avant l’adoption définitive de la loi.

I. Fiscalité des particuliers

Impôt sur le revenu : actualisation du barème et des taux (art. 2)

Le barème progressif de l’impôt sur le revenu serait revalorisé de 1,4%.

Barème progressif applicable aux revenus de 2020 (par tranches) Barème progressif applicable aux revenus de 2021 (par tranches) Taux d’imposition
Jusqu’à 10 084 € Jusqu’à 10 225 € 0 %
De 10 084 € à 25 710 € De 10 225 € à 26 070 € 11 %
De 25 710 € à 73 516 € De 26 070 € à 74 545 € 30 %
De 73 516 € à 158 122 € De 74 545 € à 160 336 € 41 %
Supérieure à 158 122 € Supérieure à 160 336 € 45 %

 

La grille des taux par défaut du prélèvement à la source serait ajustée en conséquence.

Crédit d’impôt en faveur des services à la personne (dit pour « emploi d’un salarié à domicile ») : sécurisation du champ des prestations de services éligibles (art. 3)

Le champ des services éligibles au crédit d’impôt serait redéfini pour admettre que des prestations de services réalisées à l’extérieur du domicile du contribuable soient éligibles au crédit d’impôt en faveur des services à la personne (en principe réservé aux services accomplis au domicile du contribuable), dès lors que ces prestations sont comprises dans une offre globale de services incluant un ensemble d’activités effectuées à domicile.

Pour rappel, la doctrine administrative favorable qui permettait d’inclure ces services avait été annulée par le Conseil d’État (CE 30/11/2020, n° 442046). Ces commentaires administratifs seraient inscrits dans la loi.

Un amendement (n° I-CF190) prévoit que le bénéficiaire du crédit d’impôt devrait renseigner dans sa déclaration de revenus les activités de service à la personne au titre desquelles il a engagé des dépenses éligibles. Cette déclaration permettrait une meilleure évaluation de cet avantage fiscal afin de réviser la pertinence des services éligibles, du niveau de prise en charge et des plafonds en vigueur.

Plus-values mobilières réalisée par un dirigeant partant à la retraite (art. 5)

  • Prorogation de l’abattement sur les plus-values réalisées par un dirigeant de PME partant à la retraite: l’application de l’abattement fixe « dirigeant » de 500 000 € en cas de cession de titres d’une PME soumise à l’IS à l’occasion du départ en retraite, actuellement réservée aux cessions et rachats réalisés jusqu’au 31 décembre 2022, serait prolongée jusqu’au 31 décembre 2024.
  • Aménagement du régime d’exonération de plus-value mobilière pour départ à la retraite quant au délai entre le départ à la retraite et la cession: le délai entre le départ en retraite et la cession serait porté de 24 à 36 mois pour les dirigeants faisant valoir leur droit à la retraite entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2021 si le départ à la retraite précède la cession.

Fiscalité des actifs numériques (amendements)

Le régime fiscal des actifs numériques (tels que les Bitcoins, Ethereum, ou les non-fugible tokens…) serait précisé :

  • Les bénéfices issus des opérations sur actifs numériques, autres que les plus-values réalisées par des particuliers à titre non-professionnel, seraient considérés comme provenant d’une profession non commerciale ou assimilés aux BNC (amendements n° I-CF272 et n° I-CF883).
  • Les particuliers qui cèdent des actifs numériques pourraient opter pour une imposition au barème progressif (amendement n° I-CF274). Le régime actuel prévoit que les plus-values issues de la cession d’actifs numériques sont imposées au taux global de 30% (prélèvement forfaitaire unique), sans possibilité d’option pour le barème. Or, dans de nombreux cas, le barème progressif de l’impôt sur le revenu serait mieux adapté aux contribuables.

Pourboires : exonération d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales (amendement n° I-2106)

Afin de renforcer l’attractivité des professions en contact avec la clientèle, un amendement propose d’exonérer d’impôt sur le revenu et d’exclure de l’assiette des cotisations et contributions sociales les pourboires que les salariés perçoivent, directement ou indirectement de la part des clients avec lesquels ils sont en contact, au cours des années 2022 et 2023.

Ces exonérations seraient applicables à condition que les salariés à qui ces sommes sont remises perçoivent, au titre des mois civils concernés, une rémunération n’excédant pas le montant mensuel du salaire minimum de croissance majoré de 60 %.

II. Fiscalité des entreprises

Faculté temporaire d’amortissement fiscal des fonds commerciaux (art. 6)

Le projet de loi de finances pour 2022 envisage d’autoriser temporairement la déduction fiscale des amortissements constatés en comptabilité pour les fonds commerciaux acquis entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2023.

Ce dispositif temporaire permettra, dans le contexte de sortie de la crise liée à l’épidémie de Covid-19, de soutenir la reprise de l’activité économique, dès lors que l’entreprise qui achètera un fonds commercial et qui pourra l’amortir comptablement bénéficiera d’une économie d’impôt directement liée à la déduction de l’amortissement du fonds acquis, favorisant ainsi ces opérations d’acquisition et de reprise de fonds.

Mise en conformité avec le droit européen des retenues à la source applicables aux sociétés non-résidentes (art. 7)

Cet article vise à tirer les conséquences de décisions du Conseil d’État par lesquelles certains dispositifs de retenue à la source (RAS) ont été jugés contraires aux principes de liberté de circulation des capitaux et de libre prestation de services garantis par le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), dans la mesure où la RAS due par une personne morale ou un organisme non-résident est calculée sur une assiette brute alors que, dans la même situation, une société française serait imposable sur un bénéfice établi après déduction des charges supportées pour l’acquisition et la conservation de ces revenus.

Les retenues à la source sur certains revenus non salariaux et sur les distributions seraient donc aménagées :

  • Retenue sur les revenus non salariaux (CGI, art. 182 B) : un abattement de 10% du montant brut s’appliquerait pour le calcul de la RAS, une restitution a posteriori pouvant être demandée par voie de réclamation lorsque cet abattement est inférieur au montant des charges réellement supportées.
  • Retenue à la source sur les distributions (CGI, art. 119 bis, 2) : un mécanisme de restitution a posteriori permettrait également que les charges d’acquisition et de conservation puissent être déduites, sous certaines conditions.

Entrepreneurs individuels

Un plan en faveur des travailleurs indépendants a été annoncé par le Président de la République le 16 septembre 2021. Ce plan a pour objectif d’offrir à ces entrepreneurs un cadre juridique, social et fiscal plus simple et plus protecteur lors de la création de leur entreprise et tout au long de l’exercice de leur activité. Le PLF 2022 prévoit des mesures dans le cadre de ce plan.

Allongement des délais d’option pour les régimes d’imposition à l’impôt sur le revenu des entrepreneurs individuels (art. 4)

Les entrepreneurs individuels peuvent être soumis à deux catégories de régime d’imposition :

  • le régime dit de la « micro-entreprise », ou « régime micro », réservé aux très petites entreprises dont le chiffre d’affaires ou les recettes n’excèdent pas certains seuils ; et
  • le régime réel d’imposition, ce dernier pouvant s’appliquer selon deux modalités distinctes :
    • le régime simplifié ; ou
    • le régime réel normal.

Afin de simplifier et de mieux accompagner l’évolution de l’activité des entreprises, il est proposé d’allonger les délais d’option pour les régimes réels d’imposition ainsi que les délais de renonciation à cette option.

Faculté d’option pour l’impôt sur les sociétés (IS) (amendement n° I-1987)

Un amendement présenté par le Gouvernement propose d’offrir aux entrepreneurs individuels, dont les bénéfices sont par principe soumis à l’impôt sur le revenu, la possibilité d’opter pour leur assujettissement à l’impôt sur les sociétés.

Actuellement, les entrepreneurs individuels sont soumis à l’impôt sur le revenu de plein droit (dans la catégorie dont relève leur activité : BIC, BNC ou BA), sans possibilité d’option pour l’impôt sur les sociétés, sauf à choisir le régime juridique de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL).

Dans le cadre de la réforme du statut de l’entrepreneur individuel, il est prévu que la création de nouvelles EIRL ne soit plus possible.

Afin de maintenir pour les entrepreneurs individuels l’ensemble des possibilités actuelles de modification de leur régime fiscal, l’amendement propose de permettre aux entrepreneurs individuels d’opter pour l’impôt sur les sociétés (via leur assimilation à une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, à l’instar des dispositions actuellement applicables aux EIRL) sans avoir à modifier leur statut juridique. Les entrepreneurs qui souhaitent exercer cette option devront bien entendu remplir les obligations comptables nécessaires à l’établissement de l’impôt sur les sociétés.

Doublement du crédit d’impôt pour la formation du chef d’entreprise (CGI art. 244 quater M) (art. 5)

Pour faciliter l’accès des travailleurs indépendants à la formation, il est proposé de doubler le montant du crédit d’impôt en faveur de la formation des dirigeants pour les micro-entreprises (moins de dix salariés ou total du bilan n’excédant pas 2 M€). Cette mesure permettra de faciliter l’accès des dirigeants de petites entreprises à l’offre de formation professionnelle. Cette mesure s’appliquerait aux heures de formation effectuées à compter du 1er janvier 2022.

Création d’une taxe sur les plateformes internet de livraison (art. 32)

Une taxe sur les opérateurs de plateformes telles qu’Uber Eats ou Deliveroo, qui proposent des prestations de transports ou de livraisons, serait créée. Ses recettes seront affectées à l’Autorité des relations sociales des plateformes d’emploi (ARPE). Cet établissement public administratif national sera dédié à la régulation des relations sociales entre opérateurs de plateformes et travailleurs indépendants qui recourent à leurs services.

  • La base d’imposition sera la différence entre les sommes que les plateformes encaissent et les revenus qu’elles reversent aux travailleurs ;
  • Le taux sera fixé en début d’année prochaine, quand le ministère des finances aura les données sur les revenus générés en France par ces entreprises. Il ne devrait pas dépasser 0,5 %.

III. Fiscalité indirecte

Simplification et mise en conformité avec le droit de l’Union européenne des règles de TVA (art. 9)

L’article 9 propose diverses mesures d’ordre technique destinées à rationaliser, moderniser ou mettre en conformité avec le droit européen les règles de la TVA.

Exigibilité de la TVA sur les livraisons de biens

La date de l’exigibilité de la TVA sur les livraisons de biens serait avancée à la date du versement des acomptes.

  • Cela permettra aux entreprises de déduire plus tôt la TVA sur leurs achats et d’éviter d’avoir à supporter une charge de trésorerie.
  • En contrepartie, cela les conduira à acquitter la TVA plus tôt sur leurs ventes.

Afin de permettre une mise en œuvre de ces évolutions dans de bonnes conditions, notamment sur le plan informatique, un délai d’entrée en vigueur de douze mois est prévu : cette règle sera applicable pour les acomptes encaissés à compter du 1er janvier 2023.

Option à la TVA sur les services financiers

S’agissant des opérations bancaires et financières, les opérateurs du secteur financier pourraient opter pour la TVA opération par opération et non plus globalement. Cette mise en conformité a pour but de renforcer l’attractivité de ce régime et de la place financière française.

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