Tout sur les conventions fiscales internationales et la double imposition

TABLE DES MATIERES

  • Qu’est-ce qu’une convention fiscale internationale ?
  • Qu’est-ce que la double imposition et qui est concerné ?
    • Eviter la double imposition grâce aux conventions fiscales ?
  • Avec quels pays la France a-t-elle une convention fiscale ?
  • Conseils : bien lire une convention fiscale
  • Nos avocats experts en conventions fiscales internationales

Au cœur de l’activité des équipes fiscales de Valoris Avocats, les conventions fiscales internationales jouent un rôle essentiel quant à la détermination de la fiscalité applicable à une opération internationale. Initialement, mises en place pour éviter les situations dites de double imposition, aujourd’hui leur rôle a évolué puisqu’elles s’attachent également à éviter d’éventuelles situations de double non-imposition.

Accompagnement professionnel en matière de conventions fiscales internationales

L’articulation des conventions fiscales internationales avec les règles de droit interne se révèle souvent périlleuse pour ceux qui ne pratiqueraient pas cet exercice régulièrement. C’est pourquoi l’intervention d’un praticien expérimenté en droit fiscal international est indispensable afin de garantir aux contribuables concernés sécurité et sérénité. Les équipes fiscales de Valoris Avocats parfaitement rompus à la pratique internationale, constituent ainsi des interlocuteurs de choix pour accompagner tout type de contribuable dans ce contexte.

Qu’est-ce qu’une convention fiscale internationale ?

Une convention fiscale internationale est un traité conclu entre différents États, ce qui le place en principe au-dessus des lois dans la hiérarchie des normes. L’interprétation des conventions obéit donc à deux principes :

  • Principe général de primauté des conventions fiscales internationales sur le droit fiscal interne : dès leur publication, les dispositions des conventions internationales qui pourraient être contraires à la loi interne l’emportent sur celle-ci. Autrement dit, en cas de conflit entre les dispositions de la convention et la loi interne, les dispositions de la convention fiscale internationale doivent prévaloir.
  • Principes spécifiques aux conventions fiscales bilatérales :
    • Principe de subsidiarité : les conventions fiscales bilatérales ne peuvent donner elles-mêmes un fondement à l’imposition, lequel suppose toujours l’intervention du législateur. L’objet de ces textes est seulement d’éviter les doubles impositions en organisant un partage de compétence fiscale entre les États contractants. Ce principe issu de la Jurisprudence du Conseil d’État prévoit que le juge de l’impôt doit examiner d’abord si une imposition est effectivement possible en droit interne avant de rechercher si, dans l’ordre international, une stipulation conventionnelle fait obstacle à cette imposition.
    • Principe d’autonomie d’interprétation : la qualification fiscale donnée par l’autre État à un revenu ou à une activité est sans incidence sur la manière dont le juge de l’impôt qualifiera lui-même ce revenu ou cette activité ;

Qu’est-ce que la double imposition et qui est concerné ?

La fiscalité internationale a pour vocation de fixer les règles de taxation d’une opération internationale. Une opération internationale désigne une opération réalisée par un résident d’un État sur le territoire d’un autre État, ou avec un résident d’un autre État.

Nous pouvons citer comme exemples les situations suivantes :

  • Un résident fiscal d’Allemagne qui détient un immeuble situé en France dont il tire des revenus locatifs ;
  • Un résident de France qui est associé d’une société allemande qui lui verse des dividendes ;
  • Un résident de France qui traverse tous les jours la frontière pour aller travailler en tant que salarié dans une entreprise allemande.

Dans toutes ces situations, en l’absence d’une norme qui servirait d’arbitrage, la souveraineté fiscale des deux États (ici la France et l’Allemagne) pourrait conduire à une taxation par les deux États sans prendre en compte le traitement appliqué par l’autre, c’est ce qu’on entend par « double imposition ».

Dans le premier exemple, le contribuable pourrait être taxé en Allemagne en raison de sa résidence, mais également en France car les revenus ont pour origine un immeuble situé en France. Cette double taxation n’étant pas souhaitable, les États ont progressivement conclu des conventions fiscales, dont les plus anciennes remontent à la moitié du XIXème siècle.

Plus tard, les travaux de l’OCDE ont permis de proposer un modèle de convention, régulièrement mis à jour, et utilisé par les États membres de cette organisation. A ce jour, si la majorité des conventions fiscales internationales s’inspirent très largement du modèle OCDE, chaque convention résulte de négociations bilatérales entre les États signataires, une analyse au cas particulier doit donc systématiquement être réalisée.

En clair, pour une situation donnée, selon la convention fiscale à mettre en œuvre la compétence d’imposition ne revient pas toujours au même État (de source ou de résidence). De la même manière, les mécanismes de suppression de la double imposition internationale varient d’une convention à l’autre.

Eviter la double imposition grâce aux conventions fiscales

On reconnaît en général aux conventions fiscales internationales un triple rôle : l’élimination des doubles impositions, la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale et la protection des contribuables.

  • L’élimination de la double imposition :

L’objet essentiel des conventions fiscales internationales est l’élimination de la double imposition entre les deux États contractants que l’on distingue traditionnellement comme étant, l’un celui de la source et l’autre celui de la résidence :

  • L’État de source est celui de l’origine du revenu, c’est à dire du lieu de situation du bien qui produit le revenu ou celui dans lequel une activité est exercée, ou encore le lieu de résidence du débiteur d’une rémunération ;
  • L’État de résidence est celui dans lequel le bénéficiaire du revenu a son domicile, sa résidence ou encore son siège de direction effective dans le cas d’une entreprise.

La situation de double imposition est définie par l’OCDE comme celle où un même contribuable est imposé au titre d’un même revenu ou d’une même fortune par plus d’un État. La double imposition internationale se présente dans deux hypothèses :

  • Deux États considèrent simultanément qu’un contribuable est domicilié fiscalement sur son territoire ;
  • La dualité de source et de résidence : situation dans laquelle un contribuable est considéré comme résident par un premier État, qui tire des revenus dont la source se trouve dans un autre État.

Afin d’éviter à une opération de subir une double taxation, la convention accorde à un État ou à l’autre (celui de la source ou de la résidence) la compétence d’imposition. Dans certains cas le droit d’imposer est reconnu aux deux États mais prévoit que l’impôt payé dans l’État de source donnera lieu à l’application d’un crédit d’impôt imputable à l’impôt dû dans l’État de résidence.

En fonction des conventions et de la nature des revenus dont il est question, différentes méthodes peuvent être prévues pour éliminer la double imposition internationale :

  • La méthode de l’exonération : elle consiste à n’octroyer qu’à un seul des deux États la possibilité de taxer une opération. Dans certain cas l’Etat qui exonère ce revenu peut néanmoins retenir ce revenu pour le calcul du taux d’imposition du contribuable dans cet Etat (méthode de l’exonération avec taux progressif) ;
  • La méthode de l’imputation : elle consiste à autoriser les deux États à taxer une opération mais permet au contribuable de déduire l’impôt payé dans l’État de source au moment de s’acquitter de l’imposition dans son État de résidence. La déduction s’opère par l’octroi d’un crédit d’impôt égal à l’impôt payé dans l’autre Etat, ou égal à l’impôt normalement dû dans l’Etat de résidence selon la convention mise en œuvre.

Pour y parvenir, les conventions s’appliquent d’une part, généralement, à désigner avec précision l’État de résidence du contribuable et, d’autre part, répartissent le droit d’imposer entre les États contractants en fonction de la nature de l’opération internationale visée.

  • La lutte contre la fraude et l’évasion fiscales :

Les conventions établissent les bases d’une coopération entre les États afin de lutter contre l’évasion et la fraude fiscale internationales. Cette coopération prend la forme d’une assistance administrative qui comporte, en général, un échange de renseignements et, éventuellement, une assistance au recouvrement. Des clauses « anti-abus », tendent également à éviter l’usage abusif des conventions fiscales internationales. Cet objectif a été renforcé au cours des dernières années puisqu’il figure depuis 2017 dans le préambule de la convention modèle OCDE.

  • La protection des contribuables :

Les conventions protègent les contribuables en fixant le régime fiscal applicable à une transaction, à une opération ou à un investissement déterminé. Elles permettent aux contribuables de connaître à l’avance le régime fiscal et donc les conséquences financières de leurs activités. En outre, elles contiennent normalement une clause de non-discrimination qui vise à protéger les nationaux français ainsi que les entreprises contrôlées par des nationaux français contre les discriminations de nature fiscale qu’ils pourraient subir dans l’autre État du fait de leur nationalité.

Par ailleurs, les États signataires s’engagent à se mettre d’accord dans les cas où l’application de la convention fiscale internationale ne permettrait pas de trancher en faveur d’un État ou de l’autre. Par exemple, en matière de résidence fiscale, s’il n’est pas possible de déterminer l’État de résidence d’un contribuable en application des dispositions de la convention, les États s’engagent à trancher ce point par une coopération des deux administrations.

« Si cette personne possède la nationalité de chacun des États contractants ou si elle ne possède la nationalité d’aucun d’eux, les autorités compétentes des États contractants tranchent la question d’un commun accord. » (Article 2, 4, (dd) de la convention fiscale entre la France et l’Allemagne).

Avec quels pays la France a-t-elle une convention fiscale ?

La France est l’un des États du monde qui a conclu le plus de conventions fiscales internationales. Il reste toutefois des États qui ne sont liés à la France par aucune convention (Fidji, Bahamas, Maldives, Uruguay, Yémen, etc.).

Attention, toutes les conventions fiscales ne se valent pas dans la mesure où celles-ci n’ont pas toutes le même objet. Certaines ont un champ d’application restreint et ne visent que l’impôt sur le revenu, quand d’autres concernent également l’impôt sur la fortune, la taxation des donations et successions.

Le tableau ci-dessous répertorie les États ayant conclu une convention fiscale avec la France :

Conseils : bien lire une convention fiscale

La mise en œuvre des conventions doit être réalisée avec méthode. Nous vous proposons de détailler les quatre étapes principales à suivre ci-après en traitant de la situation de M. X.

Enoncé :

Soit un contribuable, M. X de nationalité française, marié avec son épouse de nationalité française. Le couple a deux enfants qui résident avec Mme X à Strasbourg. M. X, récemment nommé à un poste important dans son entreprise est contraint de résider à Munich (Allemagne) la semaine pour y travailler. Il rentre néanmoins en France certains weekends et en période de congés. Le couple est également propriétaire d’une maison à Strasbourg occupée par la famille.

  1. X se demande, dans quel État seront fiscalisés ses salaires allemands ?
  • Etape 1 : Détermination de la résidence fiscale

Pour les administrations de France et d’Allemagne, M. X est considéré comme résident dans les deux États en application du droit interne. En Allemagne il dispose d’un foyer permanent d’habitation, et en France du centre de ses intérêts vitaux. Selon ces constats M. X est donc considéré comme résident fiscal national en droit interne français et allemand.

La convention fiscale Franco-Allemande résout ce conflit dans son article 2 en prévoyant que :

Art. 2 4. A) (aa) de la convention franco-allemande :

« Lorsque, selon la disposition de l’alinéa a) ci-dessus, une personne physique est considérée comme résident de chacun des États contractants, le cas est résolu d’après les règles énoncées ci-dessous :

Cette personne est réputée résident de l’État contractant où elle dispose d’un foyer d’habitation permanent. Lorsqu’elle dispose d’un foyer d’habitation permanent dans chacun des États contractants, elle est considérée comme résident de l’État contractant avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux) ; »

En application de cet article M. X doit être considéré comme résident fiscal de France dès lors que sa famille et son patrimoine (la maison dont il est propriétaire) se trouvent en France et constituent le centre de ses intérêts vitaux.

  • Etape 2 : Détermination de l’État de taxation en fonction de la nature du revenu

Les conventions fiscales attribuent à l’un ou l’autre État la compétence d’imposition selon la nature du revenu. En ce qui concerne les salaires, la solution est apportée par les articles 13 et 13 A de la convention.

En application de l’art. 13 de la convention fiscale Franco-Allemande :

« Les revenus provenant d’un travail dépendant ne sont imposables que dans l’État contractant où s’exerce l’activité personnelle source de ces revenus. »

Toutefois, le point (4). Ajoute :

« Nonobstant les dispositions du paragraphe (1), les rémunérations qu’un résident d’un État (ici France) contractant reçoit au titre d’un emploi salarié exercé dans l’autre État contractant (ici Allemagne) ne sont imposables que dans le premier État si :

  1. Le bénéficiaire séjourne dans l’autre État (ici Allemagne) pendant une période ou des périodes n’excédant pas au total cent quatre-vingt-trois jours au cours de l’année fiscale considérée […] »
  2. X passe 5 jours par semaine, c’est à dire 260 jours par an (hors vacances), n’est donc pas concerné par l’exception prévue par le point (4). Sa rémunération est donc imposable en Allemagne dans l’État de source.

L’analyse ne doit pas s’arrêter ici, puisque le contribuable doit encore vérifier si une taxation de son revenu est possible en vertu du droit fiscal de son État de résidence (étape 3), et le cas échéant, déterminer par quel moyen la convention évite la double imposition (étape 4).

  • Etape 3 : Imposition des salaires de M. X d’après les dispositions de droit interne en France

Si la convention attribue à l’Allemagne le droit d’imposer les salaires perçus par M. X, les dispositions de la convention ne donnent pas pour autant un fondement juridique à l’imposition. Il convient donc de rechercher si, le droit fiscal national prévoit la taxation du revenu considéré.

Les salariés domiciliés en France sont normalement imposables sur l’ensemble de leurs revenus, que ceux-ci soient de source française ou étrangère (art. 4 A du CGI). Ainsi, les salaires perçus par M. X au titre de son emploi salarié en Allemagne doivent faire l’objet d’une déclaration et d’une taxation en France au titre de l’impôt sur le revenu.

La rémunération de M. X est donc imposable en France, alors que la convention fiscale attribue la compétence de taxation à l’Allemagne qui taxera effectivement le salaire perçu par un contribuable résident de cet État au sens du droit interne Allemand.

N.B. Il existe un dispositif d’exonération totale ou partielle prévu par l’article 82 A du CGI sous réserve de remplir certaines conditions – ce dispositif n’est pas étudié dans le présent exemple dans un but de simplification.

  • Etape 4 : Elimination de la double imposition par la convention fiscale internationale

A ce stade, nous constatons que :

  • X est considéré comme résident fiscal dans les deux États en vertu de la législation interne des deux pays. Pour l’application de la convention fiscale internationale, ce dernier est considéré comme résident fiscal de France (Cf. Etape 1) ;
  • Les salaires de M. X sont taxables en Allemagne en application de la convention fiscale allemande. Toutefois, le droit fiscal interne de chacun des États prévoit une taxation des salaires (Cf. Etape 2).

Afin de garantir l’absence d’une double taxation des salaires de M. X il convient de mettre en œuvre le dispositif de l’article 20, 2, (a, (bb) de la convention fiscale franco-allemande qui prévoit que :

« En ce qui concerne les résidents de France, la double imposition est évitée de la façon suivante :

Les revenus qui proviennent de la République fédérale et qui y sont imposables conformément aux dispositions de la présente Convention sont également imposables en France lorsqu’ils reviennent à un résident de France et lorsqu’ils ne sont pas exemptés de l’impôt sur les sociétés en application de la législation interne française. L’impôt allemand n’est pas déductible pour le calcul du revenu imposable en France. Mais le bénéficiaire a droit à un crédit d’impôt imputable sur l’impôt français dans la base duquel ces revenus sont compris. Ce crédit d’impôt est égal :

  1. bb) Pour tous les autres revenus, au montant de l’impôt français correspondant à ces revenus, à condition que le bénéficiaire résident de France soit soumis à l’impôt allemand à raison de ces revenus. Cette disposition est notamment applicable aux revenus visés à l’article 3, aux paragraphes (1) et (3) de l’article 4, au paragraphe (1) de l’article 6, aux paragraphes (2), (3) et (5) de l’article 7, au paragraphe (1) de l’article 12, aux paragraphes (1) et (2) de l’article 13 et à l’article 14. »

Par conséquent, la double imposition des salaires est évitée grâce à l’octroi en France d’un crédit d’impôt égal à l’impôt Français.

En pratique, M. X déclarera ses salaires en France tout en indiquant leur source allemande et le fait que ce revenu fait l’objet d’une taxation en Allemagne. La France lui accordera un crédit d’impôt à hauteur du montant d’impôt qu’il aurait dû payer si les salaires étaient fiscalisés en France.

La convention fiscale permet donc dans cet exemple d’éviter aux salaires de M. X d’être soumis à une double imposition en Allemagne et en France.

  • Modalités déclaratives :

Enfin, d’un point de vue pratique la mise en œuvre de conventions fiscales pour les contribuables a essentiellement lieu lors de la déclaration de leur revenu. Pour les résidents fiscaux français il convient de faire apparaître dans des déclarations spéciales les revenus étrangers, afin de faire valoir les mécanismes de la convention pour éviter la double imposition. Nous pouvons citer à titre d’exemple les formulaires Cerfa N°2047 ou 2042 C.